Résumé de la thèse :
Le développement professionnel des enseignants constitue aujourd’hui un enjeu central, tant pour la recherche que pour l’amélioration du système d’enseignement, notamment en France. Cette thèse s’intéresse spécifiquement au développement professionnel sur le plan didactique, en s’attachant à comprendre comment des enseignants de mathématiques, travaillant entre pairs et sans ingénierie externe, peuvent enrichir leurs pratiques tout en mobilisant des apports de la recherche en didactique des mathématiques, lors d’une expérience de formation dans un dispositif collaboratif. Dans celui que nous étudions, des enseignants de mathématiques ont choisi de travailler sur l’introduction de la notion de fonction affine en classe de troisième. Cet objet de travail constitue un terrain privilégié pour analyser la manière dont ils construisent progressivement une enquête collective, mobilisent et s’emparent de résultats issus de la recherche, élaborent progressivement des critères et repères communs, puis les opérationnalisent en fonction de leurs propres logiques d’action. Le cadre théorique mobilisé s’inscrit dans la Théorie de l’Activité en Didactique des Mathématiques (TADM), en articulant la double approche didactique et ergonomique des pratiques (Robert & Rogalski), des apports de la didactique professionnelle (Vergnaud, Pastré) et des outils méthodologiques issus de la linguistique (Rabatel). Cet ancrage permet de documenter les processus à l’œuvre : la problématisation conjointe, qui émerge des préoccupations et organise la construction d’un espace de questionnement partagé ; la conceptualisation, dans sa double dynamique d’abstraction et de pragmatisation, rendant ainsi compte de la manière dont des éléments de savoirs didactiques se diffusent et s’intègrent, en lien avec des préoccupation individuelles, dans le système complexe des pratiques de chaque enseignant. Au-delà de l’analyse des trajectoires individuelles et collectives étudiées, cette thèse propose un questionnement théorique sur la relation entre savoirs, pratiques et développement professionnel. Elle montre notamment que les savoirs didactiques produits par la recherche peuvent être pensés comme moyen de développement professionnel, en les envisageant non pas comme un corpus externe à transmettre ou à viser, mais comme des ressources dynamiques, travaillées et reconfigurées dans l’activité même des enseignants en réponses à des préoccupations. Elle ambitionne enfin de nourrir une réflexion sur les formes que pourrait prendre la formation continue des enseignants de mathématiques.

