Chères et chers collègues,
Nous avons la très grande tristesse de vous annoncer le décès de Guy Brousseau, fondateur de la didactique des mathématiques, pilier de notre communauté. Chercheur visionnaire à la créativité exceptionnelle, Guy Brousseau a dédié sa vie à l’enseignement et l’apprentissage des mathématiques. Ses apports scientifiques sont dans tous les esprits, et la théorie des situations didactiques qu’il a fondée irrigue aujourd’hui les travaux en didactique des mathématiques de la maternelle au supérieur, inspirant de nombreux chercheurs en France comme à l’international. Son œuvre a été récompensée en 2003 par l’attribution de la première médaille Félix Klein, décernée par la Commission Internationale de l’Enseignement des Mathématiques.
L’heure aujourd’hui est au recueillement, le temps des hommages, sans nul doute nombreux, suivra. L’ARDM organisera des temps d’échanges et de partages, scientifiques et humains, et soutiendra le processus de conservation et de diffusion de son travail et de ses archives.
Les obsèques de Guy Brousseau auront lieu vendredi 23 février à 9h au funérarium de Mérignac, 1 avenue de la Grange Noire. N’hésitez pas à témoigner sur ce fil de discussion, pour lui rendre hommage : vos messages et vos pensées seront transmis à la famille.
Le bureau et le comité de l’ARDM
Je me réunis à la très grande tristesse de toute la communauté de Didactique des mathématiques pour le décès de Guy Brousseau, est j’envoie du plus profonde du cœur mes condoléances à toute sa famille. Je garderais toujours le souvenir de son humanité, de ses enseignements profondes et de son dévouement aux questions de l’enseignement et de l’apprentissage des mathématiques.
C’est encore un « grand ancien » que nous perdons. Je garde de Guy le souvenir d’un débatteur passionné et passionnant, aussi bien au Séminaire national devant un café (tout une après-midi – sans la voir passer – à la première école d’été) … dans sa voiture (lui devant comme conducteur, nous derrière avec Gérard). Il a apporté un cadre théorique très producteur et très robuste. Il a été introduit en didactique professionnelle, en transposant la notion de « situation fondamentale » pour l’introduction d’un concept par « situation pertinente » s’agissant d’acquisition de compétences professionnelles. Les phases « dévolution », « action », « validation » et « institutionnalisation » peuvent aussi se traduire mutatis mutandis, validation et institutionnalisation fusionnant dans une phase de « débriefing ». Janine Rogalski
pour le décès de Guy Brousseau, j’envoie du fond de mon cœur mes condoléances à toute sa famille et à la communauté des didactiques des maths. Je garderais toujours le souvenir de son dévouement et de son humour.
Nous serons nombreux.ses, comme anciens enseignant.es de Michelet à être présents vendredi pour un au-revoir à celui qui nous embarqua dans dans une aussi extraordinaire et originale aventure: celle des conditions de la construction et de la transmission d’un savoir.
Mes 40 années de vie professionnelle et amicale furent, à ses côtés et ceux de Nadine,irriguées, enrichies, étayées par son travail intellectuel et pragmatique au service de l’enseignement et des élèves.
Ce qu’il laisse est d’une richesse novatrice inouïe.
J’espère que la jeune génération de chercheurs saura faire la fructifier.
Denise Greslard Nédélec
Que dire … sinon ma profonde tristesse. Dès la première rencontre dans les années 70 lors d’un colloque où Jean Piaget était présent, alors que j’étais enseignant au collège expérimental de La Ricamarie, Guy a soutenu le projet. Puis devenu enseignant à l’université de Saint-Etienne et chercheur au Centre de Recherche en Education, ce sont de multiples souvenirs qui défilent dans ma tête, le séminaire national, la première école d’été à Chamrousse, puis les autres… , tant de choses autour de la théorie des situations didactiques. La TSD est un outil de modélisation capable d’analyser, d’interpréter le vécu mais également de concevoir des situations d’apprentissage novatrices. Guy est celui qui toujours a inspiré mes activités. Adieu Guy.
J’ai rencontré pour la première fois Guy Brousseau lors de mes études en licence de mathématiques à l’université de Bordeaux 1. Depuis tout mon très long parcours d’étude et de recherche a été et est constamment nourri par les idées enthousiasmantes, riches et complexes de celui que je considère comme un maître exceptionnel en didactique. Nadine Brousseau, qui nous a aussi quitté et qui fut la fidèle et chaleureuse compagne de Guy, a contribué de manière déterminante à la production des outils théoriques de la Théorie des Situations. Merci cher Guy si généreux et passionné d’avoir créé ce domaine scientifique , tu vas beaucoup me manquer, mais nous allons continuer.
Annie Bessot
« EN AFRIQUE, QUAND UN VIEILLARD MEURT C’EST UNE BIBLIOTHÈQUE QUI BRÛLE »
Je n’ai jamais vu Guy comme un vieillard et je ne me souviens de lui que comme un chercheur passionné, créatif, attentif aux autres, un pied dans la contingence, un autre dans la théorie.
La bibliothèque qu’il a crée comme celles qu’il a initiées ne brulera pas mais, je le souhaite vivement, continuera à irriguer les recherches sur l’enseignement des mathématiques bien au delà de toutes les frontières.
L’ARDM hérite là d’un flambeau qui, lui aussi, ne devra pas s’éteindre.
Antoine Bodin
En nombre del IMAC (Instituto de Matemáticas y sus Aplicaciones de Castelló). Universitat Jaume-I. Castelló, España
The Institute of Mathematics and Applications of Castellón, IMAC, (Jaume-I University of Castelló, Spain), deeply regrets the recent loss of Guy Brousseau. Professor Brousseau was the founder of COREM (Centre pour l’Observation et la Recherche sur l’Enseignement des Mathématiques), a distinguished researcher in the Didactics of Mathematics and a valued member of the Scientific Committee at our institute. In tribute to his significant contributions, the Mathematics Didactics Resource Center, CRDM-Guy Brousseau, will continue to bear his name. We extend our sincere condolences to his family and collaborators. He will be missed by the entire Didactics of Mathematics Research Community.
En nombre del Centro de Recursos de Didáctica de las Matemáticas, el « CRDM- Guy Brousseau » . Universitat de Castelló.
The Mathematics Didactics Resource Center, CRDM-Guy Brousseau, mourns the loss of Guy Borusseau, His groundbreaking work in our field has left an enduring impact. In this difficult time, our heartfelt condolences go to his family, friends and collaborators.
Pablo Gregori, Coordinator of CRDM, and Pilar Orús, honorary director.
Un regard rigoureux et pénétrant sur les questions d’apprentissage et d’enseignement.
Des propositions d’enseignement innovantes.
Le goût du débat en tant qu’hygiène intellectuelle.
Une jovialité à toute épreuve y compris lors d’échanges musclés.
Merci, Guy, pour tout cela.
Maggy Schneider
« Ils quittent un à un le pays Pour s’en aller gagner leur vie Loin de la terre où ils sont nés. »
Ce vers de Jean Ferrat résonne en moi à ces annonces qui se succèdent du départ de nos ainés cofondateurs du champ de la didactique des mathématiques dite à la française: Georges Glaeser, François Pluvinage, Gérard Vergnaud, Régis Gras, parmi ceux auxquels j’ai été très proche, et maintenant c’est le tour de Guy Brousseau que j’ai connu comme les précédents dans les années 70.
Guy Brousseau nous a aussi accompagnés dans le développement et la diffusion du
cadre théorique de l’Analyse statistique implicative. Il a été président d’honneur et aussi conférencier invité de nos colloques ASI [https://sites.univ-lyon2.fr/asi/6/?page=5].
Ce départ que j’appréhendais depuis quelque temps car il ne répondait plus à mes messages, m’attriste beaucoup.
Jean-Claude Régnier
Encore sonnée par la nouvelle, quelques mots.
De Guy, je retiens pêle-mêle la passion, le verbe haut, l’accent inimitable, le don de distinguer les failles dans les discours, la colère envers les injustices des « grands » envers les « petits » et beaucoup d’autres choses.
Guy est mort, mais l’oeuvre de Brousseau est bien vivante, parce qu’elle est fondatrice et révolutionnaire. Nous la poursuivrons, non pas en son honneur, forme de culte de la personnalité dont il aurait eu horreur, mais parce qu’elle nous permet de rendre intelligible les phénomènes didactiques. Nous essayerons d’être la hauteur, ce ne sera pas toujours facile.
Claire Margolinas
Guy Brousseau restera indissociable de la création de la communauté de didactique des mathématiques en France, tout comme Gérard Vergnaud. Il a forgé cette discipline avec un engagement profond de tous les instants qui résonnait dans ses interventions. La didactique des mathématiques doit tant à son apport immense à la compréhension de ce qui se passe dans la classe et à la conception de situations ainsi qu’à son souci d’instaurer une dialectique entre la théorie et l’expérimentation. Il est difficile d’évoquer Guy Brousseau sans penser à Nadine Brousseau, indissociable de tous les processus didactiques mis en place.
Guy Brousseau a contribué à créer l’identité de la didactique française dans le monde, la médaille ICMI Félix Klein qui lui a été décernée s’en est fait l’écho.
Je remercie Guy pour tout ce qu’il m’a appris, tout ce qu’il a apporté et qui continuera de nourrir le champ de la didactique.
Colette Laborde
C’est en arrivant à Bordeaux et en commençant à fréquenter l’IREM que j’ai fait la connaissance de Guy . A cette époque tout était en construction du côté de la didactique des mathématiques et j’ai eu le privilège d’être de ceux qui, dans le « groupe des 16 » (les profs d’école normale de l’académie de l’époque) puis par le travail à l’école Michelet ont participé à cette grande aventure de la recherche sur l’enseignement des mathématiques.
Guy était à la fois un militant, un théoricien, et un praticien. A l’époque ce n’était pas simple pour lui de faire sa place à l’université Bordeaux 1. Il devint vite plus reconnu au national et à l’international qu’à Bordeaux même.
Militant : pour élaborer le COREM et défendre la place de la didactique des mathématiques au sein des mathématiques elles-mêmes.
Théoricien : Faire en sorte que la didactique des mathématiques ne s’identifie pas à une seule des disciplines qu’il fallait côtoyer pour construire une théorie.
Praticien : la création de la COPIRELEM montrait pour lui le souci de s’assurer d’une diffusion des travaux de recherche vers les milieux de la formation. Nous avons ensuite fait vivre cette commission.
Guy maniait à la fois les interventions musclées et l’affect avec le même brio. Nous avons été quelques uns à participer à la naissance de concepts aujourd’hui bien solidifiés. Cela donne parfois la sensation d’être des anciens combattants lorsqu’à l’occasion de colloques ou de conférences on voit de plus jeunes collègues découvrant des concepts que nous pensions connus de tous. Mais c’est comme cela que la science progresse : ne pas ignorer l’existant, ne pas l’aduler : le questionner.
Longue vie à la didactique des mathématiques.
Merci Guy.
C’est avec beaucoup d’admiration et de respect que je pense à Guy Brousseau, et avec une grande tristesse que j’ai appris son décès. C’est au cours des années 80 lors des colloques de la COPIRELEM et du colloque des Professeurs d’école normales à Olivet que j’ai pu rencontrer Guy pour les premières fois, l’écouter, discuter avec lui, mieux comprendre et approfondir l’étude de sa théorie des situations didactiques. Ses travaux sont à l’origine de très nombreux concepts qu’il a toujours continué à questionner et à enrichir et qui, pour beaucoup, ont émigré dans d’autres champs de recherche. Nous lui devons également, je crois, d’avoir contribué à ancrer la didactique des mathématiques en 26ème section. Et plus personnellement, je garde un souvenir extrêmement reconnaissant de sa venue dans mon jury de soutenance de thèse lors de la grande grève nationale en décembre 1995, dans une salle glaciale de l’université déserte, après avoir beaucoup « galéré » pour rejoindre Paris depuis Bordeaux!
Les jeunes chercheur·ses rendent hommage à Guy :
Que d’heures, que de journées entières à discuter, à échanger avec mes collègues sur la dévolution ou l’institutionnalisation lors de la construction de nos situations en classe, en formation… Merci pour tout ce que vous nous avez apporté, Monsieur. Je suis heureuse de pouvoir transmettre cela à mes étudiants et aux futurs formateurs aujourd’hui.
Cécile
2021. Alors que je mène une animation pédagogique sur la coopération en résolution de problèmes mathématiques, un inspecteur me demande si je me suis inspirée de X, connue sur les réseaux sociaux. Non monsieur, je me suis appuyée sur la TSD de Guy Brousseau. Voilà : ses travaux ont tellement imprégné notre enseignement que certains en ont oublié l’origine ! L’essentielle institutionnalisation, les situations de validation, trop peu étudiées selon moi, ou les situations de formulation si nécessaires, tout cela je le dois à Brousseau. Merci.
Déborah
Je n’avais que deux élèves en cours. Un moment je m’éloigne vers le fond de la classe, eux discutent au tableau, s’animent, se prennent au jeu. Je ne saurais pas le dire finement, mais, d’un coup, j’ai vu l’adidactique. J’étais très joyeux ! et je pensais, « Brousseau est un génie ».
Nathan
En guise d’hommage, j’aimerais rappeler les mots de Guy Brousseau qui guident mon imagination dans la conception de situations d’enseignement-apprentissage : « Une bonne reproduction par l’élève d’une activité scientifique exigerait qu’il agisse, qu’il formule, qu’il prouve, qu’il construise des modèles, des langages, des concepts, des théories, qu’il les échange avec d’autres, qu’il reconnaisse celles qui sont conformes à la culture, qu’il lui emprunte celles qui lui sont utiles, etc. » (1986). Brousseau a été le fondateur de l’école française de didactique des mathématiques, nous lui devons beaucoup.
Thibaut
Un hommage de Carl Winsløw au nom de la société de recherche ERME, qu’il représente couramment : http://erme.site/2024/02/orbituary-for-guy-brousseau-1933-2024/
Gran tristeza por una pérdida irremplazable. Pero a la vez, una gran satisfacción de haber tenido a Guy, como maestro de toda mi formación doctoral en l’Université de Bordeaux y como.director del COREM,; ecosistema del que he formado parte desde mi primera visita, en una estancia breve /en el siglo pasado!) para conocer y realizar un informe precisamente, sobre ese laboratorio único de investigación en Didáctica de las Matemáticas, hasta la actualidad. Por que hoy día el COREM, sigue vivo en cada una de las personas que hemos formado parte de él, en algún momento de sus 25 años de existencia oficial. Principalmente en todas y cada uno de las y los maestros de la Escuela J. Michelet autentico pilar del ecosistema, de los PEN, que les acompañaban, así como los investigadores que hemos observado, aprendido y contribuido al desarrollo de la Teoría de Situaciones Didácticas (TSD) creada por Guy Brousseau.
Personalmente, le debo la apertura de otra dimensión de mi vida en Francia; principalmente científica, pero sobre todo humana de un gran cariño y soporte. Hoy puedo decir que poseo una gran familia francesa. Gracias Marie-Hélène et Antoine, Jean-Marie et Christiane, Denise, Christiane y las “Michelous”… De manera especial, agradezco a Nadine y Guy su generosa y siempre amable acogida. Todo te lo debo a ti, Guy. Nunca os olvidaré, Guy et Nadine. Descansad en paz
L’équipe Didactique et Épistémologie des Mathématiques (DEMa) de l’Institut Montpelliérain Alexander Grothendieck, à l’Université de Montpellier, s’associe aux condoléances de la communauté à la suite du décès de Guy Brousseau.
L’apport de Guy Brousseau, dans la constitution de la didactique des mathématiques comme science, et le développement de la Théorie des Situations Didactiques, a été fondamental. Ses idées, théories, et méthodes continuent d’irriguer toutes les recherches actuelles du domaine, et en particulier celles menées dans l’équipe DEMa. Cet héritage continuera encore longtemps de nourrir nos recherches et la formation des enseignants de mathématiques, et nous oblige, dans cet esprit de créativité, d’exigence, d’intégrité, et d’humanisme, qui caractérisent les travaux de Guy Brousseau.
J’ai rencontré Guy Brousseau pour la première fois en 1968. J’étais alors, avec beaucoup d’autres, agrégative admissible en grève de l’oral de l’agrégation. Parmi nos revendications la formation des enseignants et il y a eu une AG avec des représentants de l’APMEP et d’autres qui présentaient le projet des IREM, que nous avons repris dans nos revendications. Guy est intervenu et j’ai déjà remarqué sa force de conviction. J’ai participé l’année suivante à la création de l’IREM de Paris mais je m’occupais alors surtout des professeurs de lycée, puis je me suis éloignée quelque temps. Je suis revenue en 1975 pour participer aux observations que faisait Régine Douady à Montrouge. Notre approche des décimaux était différente de celle de Bordeaux, nous avons eu des discussions passionnées sur le fractionnement et la commensuration et aussi sur l’institutionnalisation à la première école d’été en 1980. J’ai lu les brochures de l’IREM de Bordeaux à cette époque mais ce n’est qu’en 1993, en préparant ma conférence des 20 ans de didactique et en découvrant les documents rédigés dans les années 60 chez Guy et Nadine qui m’avaient accueillie chaleureusement, et en interrogeant Guy (quand j’arrivais à le retenir) et Nadine, toujours présente, que j’ai vraiment compris le projet et sa portée.
J’avais déjà commencé à utiliser la théorie des situations dans ma thèse pour interpréter les difficultés des élèves et des enseignants dans des classes faibles, en interrogeant la dévolution et l’institutionnalisation comme un processus à gérer par le maître pour que la situation adidactique permette l’apprentissage des élèves, en particulier dans ces classes faibles. Guy était dans le jury et je me souviens qu’il a repris la parole après le président qui, selon lui, avait abusé de son privilège de parler en dernier. Par la suite, j’ai essayé de revoir ce que j’avais fait à la lumière de la théorie des situations et de comprendre comment on pouvait l’utiliser pour analyser des séquences ordinaires. Chaque fois que je relisais un texte de Guy j’y trouvais quelque chose que je n’avais pas bien compris précédemment. Et la théorie des situations a continué à guider pour une bonne part les travaux que j’ai menés ensuite sur la géométrie. Merci Guy pour tout ce que tu m’as apporté.